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Qu’est ce que l'homéopathie ? Rien de rien.

L'image de l'homéopathie est celle d'une médecine "douce", "naturelle", "traditionnelle". Elle est perçue comme l'héritière de la sagesse ancestrale et de l'empirisme inspiré de générations d'herboristes, se transmettant au fils des temps les vertus bienfaisantes des plantes de nos campagnes…

C'est pourquoi elle est la médecine préférée des écologistes "sentimentaux". Cette image est d'ailleurs soigneusement entretenue par l'industrie homéopathique. Il n'est pas de reportage sur l'une de ses unités de production qui ne montre des broyeurs engouffrant des montagnes de plantes médicinales.



Passons sur le premier de ces termes, l’utilisation de l’adjectif " douce " n’étant là que pour faire paraître " dure " la médecine moderne. En fait une technique médicale n’est ni " dure ", ni " douce ", elle est, ou n’est pas, efficace. Ensuite, tout est question d’utilisation et de rapport efficacité/risque.



Le qualificatif de médecine naturelle mérite lui, plus d’attention. D’abord parce qu’il s’appuie sur l’inconscient rousseauiste, pour lequel la nature est bonne et les créations humaines mauvaises. Le mythe du bon sauvage a encore frappé ! Peu importe l’éradication de la variole, la disparition de la polio, la maîtrise des maladies infectieuses, les progrès des anticancéreux et des antiviraux. Peu importe la libération des enfants-bulles grâce à l’apport des thérapies géniques. Peu importe que les peuples encore privés, hélas, des progrès médicaux survivent dans des conditions désastreuses avec une espérance de vie deux fois plus faible que la nôtre...



De plus, elle est loin de n'utiliser que des végétaux : broyât d'abeilles, de vers de terre, de puces de chats et de chiens ou de chenilles processionnaires sont aussi au programme. Tout cela évoque plus la caverne de la sorcière que l'herboristerie provençale. Bien entendu, les homéopathes se gardent bien d'insister sur ces détails peu ragoûtants et, dignes héritiers du "médecin malgré lui", transforment le vers de terre en "lambricus terrestris".





"Entendez-vous le latin ?"



D’ailleurs l’opposition médecine naturelle médecine moderne est un faux problème (2). En effet nombre de médicaments actuels sont extraits ou copiés de molécules présentes dans la nature. Depuis l’aspirine, héritière de la décoction de feuilles de saule, jusqu’à l’extrait de pervenches et aux taxoïdes de l’écorce d’if utilisés en chimiothérapie anticancéreuse. Ce que fait le chimiste, c’est extraire la molécule active, la synthétiser, ou en trouver une nouvelle qui présente des groupes fonctionnels équivalents, dans l’espoir d’en éviter les inconvénients (3) , ou de rendre le remède plus efficace.



L'homéopathie est-elle enfin une médecine traditionnelle ? La réponse est claire. L'homéopathie est d’apparition récente (fin XVIIIème ) et elle est le fait de " l’illumination " d’un seul homme, ce qui la rattache plutôt à une secte qu’à une tradition séculaire.



Cela nous amène à examiner les bases de ce que l’on doit plutôt appeler une doctrine.







LES BASES DE L'HOMÉOPATHIE



L'homéopathie repose sur quatre principes : la similitude, la dilution, la dynamisation et la personnalisation.





Le principe de similitude.



L'homéopathie est issue de l’imagination de Friédrich Hahnemann, né en Saxe en 1755. Il étudie la médecine, mais en abandonne la pratique en 1789, déçu par les résultats qu’il obtient. La médecine de l’époque n’offre que purgations, clystères et saignées. Lui, et c’est tout à son honneur, veut guérir les malades.



Apprenant qu’une décoction d’écorce de quinquina est censée guérir le paludisme, il teste sur lui-même les effets de ce produit. Il ressent alors des troubles qu’il assimile aux symptômes de la maladie. C’est une révélation ! Il en tire la règle de base de l'homéopathie : " Similia similibus curantur ", les semblables sont guéris par les semblables. Ce qui signifie que tout produit capable de provoquer sur un sujet sain les symptômes d’une maladie est capable de la guérir.



Après expérimentation de multiples drogues et poisons sur lui-même et ses disciples, il publie, en 1819, " L’organon de l ’art de guérir ", qui deviendra la Bible des homéopathes.



On peut admettre la bonne foi d’Hahnemann, face aux connaissances de son temps. Mais aujourd’hui, les progrès accomplis dans la connaissance des maladies font table rase du principe de similitude. Une maladie se guérit en agissant sur ses causes et non sur ses effets. De plus, aucun médicament réellement actif n’a jamais vérifié le principe de similitude. Imagine-t-on par exemple un antibiotique reproduire sur un homme sain les symptômes de la maladie qu’il guérit ?



Quant à l'amalgame fait de ce principe avec celui de la vaccination ou de la désensibilisation, il est sans fondement. Ces méthodes ont pour but de permettre à l'organisme de développer ses propres défenses face à l'agent pathogène, ce qu'il ne saurait faire face à un produit qui provoque seulement les mêmes symptômes.





La dilution.



Afin d’éviter les ennuis provoqués par l’ingestion de produits souvent dangereux utilisés sous forme brute, Hahnemann procède à leur dilution. Ce principe, né de la nécessité, sera justifié et théorisé après coup.



Hahnemann part d’une solution mère obtenue, par exemple, par macération de graines de café dans de l’eau(5) . Il prend une goutte de la solution mère qu’il mélange à 99 gouttes de solvant (eau ou plus rarement alcool). Il obtient ainsi le dosage 1CH (Centésimale Hahnemanniènne). Il prélève une goutte de cette solution et la dilue à nouveau dans 99 gouttes de solvant (2CH). Et ainsi de suite jusqu’à 30CH (Limite actuelle des préparations homéopathiques). La dilution réelle est donc alors de 10-60 (xCH correspond en effet à une dilution de 10 -2x de solution mère). Pour ceux qui ont gardé un mauvais souvenir de leur professeur de mathématiques, ce chiffre ne signifie rien. En fait, la présentation de ces dilutions par opérations successives bloque toute représentation concrète.



Pour être plus clair, imaginons donc de calculer dans quel volume d’eau il faut diluer, en une seule opération, la fameuse goutte initiale de teinture mère... Supposons qu’une goutte fasse 3 cg, c’est-à-dire 0,03g, soit un volume d’environ 0,03 cm3 ou encore 3.10-8 m3. Il faut maintenant multiplier par la valeur de la dilution pour obtenir le volume de solvant nécessaire. Ce qui donne : 3 10-8 .1060 = 3 1052 m3. Soit un cube d’un peu plus de 1,44 1017 m de côté.



Si vous avez tenu bon jusqu’ici, voici venu le moment où tout va s’éclaircir. En effet sachant que la distance de la terre au soleil est d’environ 1,5 108 km, soit 1,5 1011 m, on comprend donc que le volume de solvant nécessaire à la dilution immédiate permettant d’obtenir une solution 30CH est, celui d’un cube dont l’arête est d’environ 2 millions de fois la distance de la terre au soleil...Est-il besoin d’ajouter des commentaires ?



Pour ceux que cet argument pour le moins massif n’aurait pas totalement convaincus, ajoutons en un autre. Tout élève qui est passé, ne serait-ce que près du radiateur, dans une classe de chimie de lycée, se souvient du fameux nombre d’Avogadro. Ce nombre, aux allures magiques, (6,023 1023) représente le nombre de molécules vraies existant dans une mole. Or, à la première dilution, on ne garde que 1/100 des molécules (10-2 ), ce qui signifie qu'au delà de 10-24 (12CH), il ne reste aucune molécule de la solution initiale, d’autant que la goutte de départ était loin de contenir une mole, et que la solution mère elle-même était en grande partie constituée de solvant. En fait on doit considérer que toute dilution supérieure à 8 ou 9 CH ne contient plus rien.



Alléguer que la connaissance de la matière n’est pas achevée n’est que mauvaise foi et incompétence. Les physiciens ont en effet, depuis longtemps, franchi la barrière de la molécule et de l’atome, pour répertorier les particules élémentaires, et ils voguent aujourd'hui gaiement dans l’antimatière. Pourtant, ni l’un ni l’autre de ces domaines ne peut intervenir au niveau d’une banale réaction biochimique.



En résumé, le médicament homéopathique ne contient "rien".



Dans le dossier "L'homéopathie au banc d'essai" publié en juin 1998 par "La Recherche", Annette Millet nous décrit en détail le processus de fabrication des granules et nous montre qu'il n'a rien à envier à ceux des plus grands laboratoires pharmaceutiques. Il ne manque que l'analyse du produit fini, le "rien" n'étant pas dosable.



Nous voilà rassuré, les produits homéopathiques ne contiennent "rien", mais ce "rien" est fabriqué avec le plus grand soin !



Ne quittons pas ce domaine sans nous pencher sur l'intéressante technique de dilution Korsakovienne, mise au point par Siméon Korsakov, général russe dans les années 1830, et récemment réintroduite en France pour cause d'harmonisation européenne. La description de la méthode se suffit à elle-même. Remplir un flacon de teinture mère. Le vider. Ce qui reste sur les parois est censé représenter 1/100ème du volume initial. Remplir d'eau, agiter et vous avez la première korsakovienne (1K). Vider à nouveau, remplir d'eau, agiter et vous avez la dilution suivante. On peut aller ainsi jusqu'à 50 000 K ou 100 000 K et c'est donc ce qu'on pourrait appeler "l'eau de rinçage final" qui est utilisée à des fins thérapeutiques.



On croit rêver !



Suite de l'article : pseudo-medecines.org

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