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Arthrite-sur-clone

Si Dolly-la-brebis souffre d’arthrite, et si les clones sont généralement aussi mal en point qu’elle, à quoi bon tout ce bruit autour des cochons clonés de la semaine dernière?


Peut-être à rien, justement. Pour l’instant, il n’y a eu aucune étude sur la santé à long terme des animaux clonés, pour la simple et bonne raison qu’il n’existe encore aucun clone d’un animal adulte qui ait plus de cinq ans et demi —l’âge de Dolly. Par conséquent, toute affirmation que vous avez pu entendre depuis une semaine sur les perspectives de clonage -animal ou humain- relève de la pure spéculation.


Mais en attendant, les actions bondissent. La compagnie PPL Therapeutics, à qui on doit, jeudi dernier, la deuxième annonce en autant de jours de cochons clonés (et la moins solide des deux) a vu aussitôt la valeur de ses actions grimper de 40%. Et elle a vu le tout redescendre de 15% le lendemain, lorsqu’est sortie la nouvelle sur Dolly.


PPL Therapeutics est une créature de l’Institut Roslin, ce centre de recherche où est née Dolly à l’été 1996.


Tout cela reflète des attitudes irresponsables à l’égard de la santé des animaux innocents, ont protesté les écologistes vendredi. Ils exigent des scientifiques qu’ils mettent fin à ces expériences tant qu’on ne saura pas s’ils ne sont pas en train de faire souffrir des animaux en vain. Mais comment le saura-t-on si on arrête les expériences?


A tout le moins, il est plus que temps de rediriger les efforts des chercheurs vers la santé des bestioles clonées, a réclamé Ian Wilmut, considéré comme le "père" de Dolly, et qui est devenu très critique face à tous les débats sur le clonage, depuis deux ans —en particulier dès qu’il est question de clonage humain. C’est lui qui a dévoilé, sur les ondes de la radio de la BBC vendredi midi, que Dolly souffrait d’arthrite dans sa patte arrière gauche.


Certes, a-t-il ajouté, il est impossible de savoir si cette arthrite prématurée (l’espérance de vie d’une brebis est de 12 à 14 ans) est causée par le clonage, ou si Dolly n’en aurait pas souffert de toutes façons. Mais on ne peut s’empêcher de rappeler qu’il y a deux ans, on avait découvert que les chromosomes de Dolly montraient des signes de vieillissement prématurés —un peu comme si, lors du clonage, "l’horloge génétique" ne s’était pas remise à zéro.


Et bien sûr, il y a ces multiples cas de malformations, de systèmes immunitaires déficients et de mortalités précoces chez les animaux clonés, qui se succèdent depuis cinq ans. Sans compter le taux anormalement élevé de fausses-couches. Et le fait que la majorité des tentatives de clonages échouent avant même que l’embryon ait pu être réimplanté dans l’utérus. Tout ceci a déjà fait dire à plusieurs que la technique était loin, très loin, d’être au point : de toute évidence, des informations essentielles manquent encore aux chercheurs.


Qu’en est-il de la santé des cochons clonés dont il a été question la semaine dernière ? Rien n’a filtré sur ce point, justement. Tout ce qu’on a pu constater, c’est que, à 24 heures d’intervalles, deux compagnies rivales, PPL Therapeutics et Novartis, ont annoncé avoir cloné des cochons dont les organes pourraient un jour servir à des transplantations chez des humains. Dans les deux cas, il s’agit de cochons génétiquement modifiés à cette fin : on leur a enlevé un gène qui devrait, en théorie, réduire les risques de rejets chez l’humain.


On sait par contre que pour obtenir ses cinq cochons miniatures, PPL a dû implanter 3000 embryons génétiquement modifiés dans 28 mères-porteuses. Ce qui donne une petite idée du taux d’échecs de la technique... Sept cochons sont nés, cinq ont survécu.


Les cinq cochons de PPL Therapeutics sont nés le jour de Noël, et ont été annoncés mercredi dernier —une journée avant la parution d’un article dans Science sur les quatre cochons de Novartis et de leur partenaire, BioTransplant, nés en septembre et octobre. L’annonce de PPL visait donc, vraisemblablement, à couper l’herbe sous le pied de ses concurrents, puisque la naissance des cochons PPL n’a pas encore eu le temps de faire l’objet d’un article scientifique, et encore moins d’un article révisé par un comité de rédaction, au contraire de Novartis.



Si la transplantation d’organes de cochons chez l’humain devenait une réalité médicale, cela pourrait devenir un marché se mesurant en milliards de dollars —en raison de la pénurie chronique d’organes à transplanter. Mais il y a un gros " si " : plusieurs pays maintiennent un moratoire sur de telles greffes animaux-humains, devant la crainte que des virus encore mal connus ne soient eux aussi transplantés.





Par pascal Lapointe :
Sciencepresse

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