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Essai Volkswagen Phaeton

Dans l'opéra de la berline de prestige, où les acteurs établis jouent avec pas moins de 8 à 12 cylindres, la dernière recrue se nomme Phaeton, une oeuvre de Volkswagen qui veut quitter le bal musette pour la grande musique.

Produite dans une toute nouvelle usine à Dresde dont la construction a englouti la bagatelle de 200 millions d'euros, la Volkswagen Phaeton, nouveau et prestigieux porte-drapeau de la marque, bénéficie d'une plate-forme évidemment inédite. Berline trois volumes de facture relativement classique, elle s'étire sur un empattement généreux de 2,88 m et sur des porte-à-faux qui ne le sont pas moins, puisqu'ils portent la longueur hors tout à 5,05 m. Ce qui place effectivement la Phaeton en concurrence directe des BMW Série 7 (5,03 m), Audi A8 (5,03 m), Mercedes S (5,04 m) ou Lexus LS (5,00 m). Des concurrentes redoutables et bien établies dans le créneau, mais dont Volkswagen entend bien se différencier par des choix techniques inédits.



Le nouveau haut de gamme populaire


A commencer par la gamme des moteurs, puisque celle-ci comporte dans un premier temps un 6 cylindres et un W12 de 6 litres (en attendant un W8 pour plus tard et, surtout, un V10 TDI à injecteurs-pompes de quelque 330 ch et... 750 Nm. Le W12 est bien entendu celui inauguré récemment par l'A8. Rappelons brièvement qu'il s'agit de deux VR6 accolés l'un à l'autre suivant un angle de 72°. Résultat: 420 ch pour ce qui est jusqu'à présent la Volkswagen du commerce la plus puissante de tous les temps. Il est accolé à une boîte automatique à 5 rapports comprenant la sélection manuelle des vitesses au départ de deux excellentes palettes situées de part et d'autre du volant. Bien entendu, la transmission se fait aux 4 roues en permanence, via une vraie transmission "quattro" à différentiel interponts Torsen. C'est l'un de ces prototypes pratiquement finalisé qu'il nous a été donné de conduire brièvement en Laponie, sur la base de la dernière série d'essais hivernaux de l'équipe de tests. Mais pas question de laisser faire n'importe quoi à des journaleux; une petite boucle de 20 km sur des routes enneigées, quelques essais de freinage et un slalom sur la glace et basta.



Ne revenons pas sur les qualités connues de puissance de souplesse et de silence du moteur. Attardons-nous sur la suspension, inédite dans le segment puisqu'elle est pneumatique, une autre première pour la marque. Ce choix a été dicté par la volonté, disent les ingénieurs, de concilier agrément de conduite dynamique et confort de haut niveau. A la place des ressorts hélicoïdaux traditionnels, on trouve des soufflets remplis d'air plus ou moins comprimé (de 6 à 10 bars en fonction des circonstances) qui ont le double avantage d'offrir un amortissement progressif mais aussi – moyennant un contrôle de la pression interne – de garantir une assiette constante quelle que soit la charge tout en autorisant une variation de la hauteur de caisse en la tassant par exemple au maximum à haute vitesse (moins 15 mm à partir de 160 km/h) pour abaisser le centre de gravité de l'auto et réduire parallèlement la surface frontale. En l'occurrence, le conducteur de la Phaeton peut également choisir lui-même d'ajuster la hauteur de caisse (+25 mm maximum par rapport au réglage de base) via un interrupteur sur la console centrale pour l'adapter à des circonstances particulières (évolution en terrain difficile par exemple).



Ces ressorts pneumatiques – déjà vus sur l'Audi Allroad – se doublent ici d'un pilotage électronique en continu de l'amortissement où le conducteur peut choisir entre quatre niveaux allant du plus confortable au plus sportif. Cette régulation se fait individuellement roue par roue au moyen d'accéléromètres enregistrant les mouvements de caisse verticaux sur chaque tige d'amortisseur. La fourchette de tarage va de 300% en détente à 600% en compression et l'ajustement se fait à une vitesse de l'ordre de quelques millisecondes. Cette vitesse et cette amplitude de réaction permettent d'agir partiellement sur le contrôle du roulis, en jouant sur le tarage en compression des amortisseurs extérieurs et sur la détente des éléments intérieurs à la courbe.



Par rapport à une suspension hydraulique du genre Hydractive, les avantages résideraient dans un confort accru du fait de la possibilité de descendre très bas (jusqu'à un 1 Hz) en matière de fréquence propre et par l'absence de nécessité de stocker l'huile quelque part, puisqu'il suffit ici d'aspirer de l'air ambiant et de le sécher avant de le stocker dans un accumulateur de pression pour faire face à des besoins ponctuels. La confrontation avec les suspensions pneumatiques des Lexus LS430 et Mercedes Classe S s'avère intéressante...



Dans la pratique, et sans nous prononcer sur le comportement routier proprement dit – car, en l'absence d'adhérence latérale, il apparaît difficile de le juger –, il semble tout de même que le confort de marche atteigne un très bon niveau, grâce en particulier à un bon filtrage, excellent même sur le réglage le plus soft, encore acceptable sur le plus sportif. Le calibrage de l'ESP laisse pour sa part quelque latitude à de légères dérives, participant ainsi à un plaisir de conduite dynamique, même si on eût peut souhaiter éventuellement un seuil d'intervention de l'ESP spécifique à chaque programme d'amortissement, sport ou confort.



En revanche, ESP débranché, l'épreuve du slalom a laissé entrevoir pas mal d'inertie dans les changements d'attitude, ce qui s'explique bien évidemment par des porte-à-faux importants influençant négativement l'inertie polaire et un poids qui ne l'est pas moins, puisque la Phaeton W12 telle que nous l'avons conduite dépassait – malgré son capot moteur, sa malle et ses portes en alu – les 2.300 kg, à comparer aux 1.980 kg d'une A8L 6.0. Enfin, pour un véhicule de ce gabarit, l'habitabilité arrière ne nous a pas semblé extraordinaire (principalement pour les jambes), au contraire du volume de coffre, supérieur à 600 l (de quoi loger... 6 clubs de golf) et de celui de la boîte à gants, capable d'engouffrer le sac à main de madame.



Parmi les raisons de cet embonpoint, il faut sans doute pointer la richesse de l'équipement: sièges électriques, chauffants, réfrigérants et massants aux 18 réglages (idem à l'arrière, où la banquette est remplacée par deux sièges individuels), la climatisation Climatronic à quatre zones grâce à laquelle chaque passager dispose de son réglage individuel, la superbe installation audio (12 haut-parleurs), le système de navigation (à CD plutôt que DVD, hélas) et de téléphone...



L'ensemble est traité avec goût et intelligence (même si la compréhension globale de la console centrale multifonction demandera un peu de temps) et la finition, même sur ces protos de présérie, apparaît superbe. A tel point que, même si ça fait un bout de temps que l'on se la pose, la question est aujourd'hui plus que jamais d'actualité: que reste-t-il à Audi à part ses quatre anneaux et l'image qui va avec? A l'inverse, l'origine étymologique de la marque Volkswagen ("voiture du peuple"!) ne risque-t-elle pas de constituer un frein à son rayonnement dans la sphère du prestige? Car quand il voulut emprunter le char de son père, le fils du Soleil – Phaeton – faillit embraser l'Univers. Courroucé, Zeus le foudroya...



Source : Le Moniteur Automobile

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