Comment vaincre une opposition? « Par l'écoute et la discussion » vous répondraient certains. Alors la discussion tue l'opposition? Certainement pas, mais en tout cas elle l'a rend intelligente. Mais alors comment vaincre l'opposition quand on est pressé? Pas le temps de parler, j'ai un business à faire marcher. On peut supprimer l'opposition. C'est simple et rapide! Mais non, mais non, méchant homme car alors comment donneras-tu des leçons de morale au monde entier? Le baillon? Même sanction! Mais si on ne peut empêcher les gens de parler comment faire? Empêches alors les autres d'écouter.
Dans la grande série, on prépare le terrain pour la prochaine année, voici l'association suprême: loi de marché et censure. Un majestueux mélange qui permet d'éliminer les gêneurs, les empêcheurs de manipuler en rond, les remplisseurs d'esprit et autres contestataires de la fatalité socio-économique.
Malgré quelques folies royales, j'ai plutôt fier de notre radio publique: France Inter avait jusqu'à maintenant réussi le pari de rester une radio grand public de qualité et surtout intelligente. Ecoutez ca n'a rien à voir qu'ils disaient et c'était vrai. Parmi les ovni radiodiffusés sur cette chaîne on trouvait: là-bas si j'y suis de Daniel Mermet. Une émission clairement partisane et sans concession. Du reportage social , une heure avec un esclave à Dubaï, une surveillante d'hôpital à Paris, un animateur-vendeur en supermarché en banlieue parisienne, un gamin des rue à Bucarest, un yesman à New-York, un journaliste à Djakarta, des réfugiés au Rwanda, un agriculteur des Pyrénées... On se prend des doses de réalité, émouvante, terrifiante, contrasté. Brefs des choses rares à la radio. Mais encore plus rare de l'histoire traitée subjectivement. Ici pas de couvert de l'objectivité, elle n'a ni place ni lieu durant cette heure. On ne se cache pas derrière l'objectivité si chére à nos école et qu'on enfonce d'un coup de législation positiviste. Alors qu'est-ce qui se passe? On roupête, on injurie les intervenants, on râle mais on rit aussi, on se dit « tiens je n'avait jamais vu les choses sous cet angle », on est heureux de voir d'autres gens comme soit... Mon dieu, on réfléchit!!! On vit par soit même, on pense même pouvoir aller nager dans le grand bain.
Gênant, gênaaant... pour les moralisateurs, ces grands théoriciens non pratiquants. Alors que faire de cette émission? Elle a son publique, elle a ses fans et ses détracteurs. Que faire de cette émission qui fait réagir si violemment les gens? Et on les entend ces gens! Chaque émission commence par les messages laissés par les auditeurs sur le répondeur de « Là-bas si j'y suis ». Les propos sont souvent vifs, très vifs et montrent en tout cas la passion soulevée par les sujets traités. Et nous y voilà, bientôt des élections, un climat social agité. Que faire de « Là-bas » ? La supprimer? Trop risquée, elle a son publique. Satanés auditeurs! Et bien déplaçons-la! Oui, fini la fin d'après midi et les sorties de bureau. Vive le milieu d'après midi, le creux de vague! Et puis ensuite, chute de l'audimate, audiance faible, quelle belle odeur de placard.
En tout cas cette émission tout dérangeant qu'elle soit à sa place sur un service publique. Elle agit comme un forum, le lieu indispensable à toute démocratie.
Daniel Mermet suivra-t-il le chemin qu'on a déjà tracé pour Alain Rey? Pierre Bouteiller et Jean-Luc Hees ont déjà inauguré la voie.
Pétition Là-bas si j'y suis
Le site non officiel de Là-bas si j'y suis
Bonne nouvelle pour ceux qui se réjouisse de cette déprogrammation: Fogiel arrive sur Inter. Vous êtes rassuré pour votre redevance? (fait rigolo: généralement les gens qui se réjouissent sur le répondeur de l'émission du déplacement d'horaire de l'émission parlent forcément de leur redevance). Elle n'ira pas ni à des gauchistes ni à des personnes ayant une conscience.