Aujourd'hui c'est le 50ième anniversaire du premier satellite artificiel de la Terre. Lancé par les russes, observé par le monde. 50ans plus tard, on en apprend un peu plus sur sa conception plutôt chaotique et surtout son mystérieux concepteur: Sergei Korolyov.
Oui, rien n'a jamais été certain dans le lancement de Spoutnik, présenté à l'époque comme une grande aventure nationale et néanmoins soviétique, elle apparaît de nos jours comme l'aventure de quelques uns qui finalement ont payé assez cher le prix de leur rêve. La grandeur de l'Homme rencontre la petitesse de l'homme.
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Mais revenons un instant sur la vie de Sergei Korolyov. Très vite il se passionne pour l'aéronautique et plus particulièrement les fusées et autres missiles. C'est un brillant étudiant qui progresse vite au sein des instituts aéronautiques russes. Très vite, il veut lancer l'Institut de la Réaction (RNII). Un premier succès avec le lancement de la première fusée à carburant liquide (développée également par Glouchko) la GIRD-09 accéléra la création du RNII. Korolyov a son jouet, il va enfin pouvoir se consacrer pleinement à son grand projet: atteindre l'espace grâce à un propulsion liquide. Mais tout n'est pas pour le mieux dans le meilleur des mondes socialistes: les militaires veulent des missiles balistiques! Les missiles sont propulsés par des carburants solides (poudres). Korolyov est démis de sa fonction de directeur, il reste cependant au RNII. Puis vient la grande époque des purges staliniennes 1938, Korolyov est dénoncé par Glouchko (lui-même déjà emprisonné) pour activité anti-communiste: la propulsion liquide! Il est condamné à dix ans de prison et déporté dans un goulag. Il doit sa survie à Andreï Tupolev qui demandera et obtiendra le transfert de Korolyov dans une équipe d'ingénierie d'avions de combat (Tupulev et son équipe sont eux aussi emprisonnés à cet époque). A la fin de la seconde guerre mondiale Korolyov est envoyé en Allemagne pour découvrir le secret des armes V allemandes et reprend sa vie « libre » de concepteur de fusée.
Mais retournons à notre satellite; le lancement du satellite était considéré comme douteux par le gouvernement soviétique qui voulait entendre parler de fusée en mode intercontinental et non en mode spatial. S'il n'y a rien à exterminer pourquoi y aller? Les concepteurs de Spoutnik et de son lanceur travaillaient à la base à la conception de fusée destinées à être lancées vers les américains au cas où. Leurs noms furent tout simplement oublié de l'histoire et classés secret défense. C'est seulement après sa mort que le nom de Sergei Korolyov sorti des tiroirs. Et le succés de Sputnik vient de la détermination de cet homme et de la passion de son équipe.
L'équipe de Sergei Korolyov travaille donc initialement sur un fusée intercontinentale. Ils développent le R-7 un lanceur, sans doute le plus puissant du monde à l'époque. C'est la guerre froide, la course entre russe et américain: on joue à celui qui à le plus gros! Mais faute de menace nucléaire sérieuse, le R-7 doit trouver une autre application. Nous sommes en 1956, le projet nucléaire connaît quelques doutes. Korolyov saute sur l'occasion et se lance dans un programme spatial. Il a même trouver la motivation: les USA ont prévus de lancer leur propre satellite en 1958. 1956, Korolyov a l'accord du gouvernement pour se lancer dans la course à l'espace. Le temps presse, Korolyov décide de faire vite et efficace. Il demande à son équipe de dessiner un satellite, le plus simple possible qui sera lancé sur l'orbite: Prosteishiy Sputnik ou PS-1 est né. ( Prosteishiy Sputnik se traduit par le plus simple satellite ou compagnon). Pressé, Korolyov refuse même qu'on embarque des équipements de mesure sur le Sputnik. PS-1: une boule + quatre antennes, sera construit en 3 mois. Tout est prêt, la date de lancement prévu pour le 6 octobre. mais le KGB affirme que les américains ont avancé leur lancement au 5. Pas peur, pas mal, les russes lanceront le 4!
Bonjou, bonjour, le 4 octobre Sputnik émet de l'espace le bip le plus connu de l'histoire du monde. Pour la petite histoire, Sputnik était trop petit pour être visible à l'oeil nu, ce qu'on pouvait par contre voir en orbite était un étage du lanceur qui a fini lui aussi sur orbite (La pollution commence!). Après le lancement Korolyov appelle Khrushchev pour lui annoncé leur succès. Khrushchev ne considère pas cette information comme importante et passe complètement à coté de l'événement. La Pravda ne relatera que brièvement la mise orbite et encore perdu un entrefilet perdu au milieu du journal. Dans le reste du monde, c'est un grand événement! Il faudra deux jours à la Russie pour mesurer son exploit et l'engouement qu'il a provoqué.
En attendant, Korolyov reste dans l'anonymat, son nom n'apparaît nul part. Leonid Sedov est même désigné comme le père de Sputnik. Korolyov est seulement autorisé à publier ses travaux d'intérêt mineurs sous le nom de Professor K. Sergeyev. Le sucés de Korolyov lui vaut même les inamitiés de nombres de ses collègues et la rancune des militaires. Korolyov compare son travail et sa vie à celle d'un mineur de fond: pas de vue, pas de ciel. Il terminera sa vie durement.